Sommets

Inscrits sur le grand livre du Vercors,
petits pas innocents,
douce signature de l’hermine blanche, sortie du bois, hier soir.

Sommets…

Sommets immaculés, intouchables,
Nulle présence à pousser un juron, un cri
à dynamiter vos épaules,
le vent sculpte vos plis sans une écorchure,

Monstre apaisé, la vallée goûte le chant du torrent
renversant ses murmures jusqu’aux cimes.

Ici-bas, les violents agissent, poussière d’hommes, sans paysage.

Ma robe du futur,

Je suis fleur de coton

que les mots satinent.

Tu m’offres le Lyocell

au fil d’Eucalyptus

artificiel,

ou le Tencel qui souffle

le chaud et le froid.

Reverrons-nous les

métiers à tisser

des fils de soie

au couleurs chatoyantes ?

Elles n’ont plus le temps

des cols froissés à repasser;

Comme l’amour,

l’habit ne dure que le temps d’une soirée,

l’habit aux marges grandissantes,

qu’il faut apprendre à recycler.

Comme l’amour,

l’habit est une deuxième main,

Poli Esther.

Je garde ma jupe en jean

inoubliable, infroissable,

pliée dans tous mes bagages

sans âge.

Et le poète file la laine des mots

en vert.

Ma robe du futur sera t’elle proche de la nature ?

Bambous, roseaux ou pétales,

de coquillages,

de mers et d’océans.

Ma robe du futur habille le rêve.

Saypé

Saypé, tu dis la paix, au géant dessin,
Tu scelles des mains,
Conviction éphémère, guerres, sans fin et ça recommence,
Sois le marcheur dans une herbe sans la souiller !
Quand bien même avec de la peinture bio !
Dis-moi le contraire : Les couleurs nous promènent,
La nature est Art, O combien belle, à elle-même se suffit !

Hommage à Bernard Pivot

Reçu ce matin un SMS
« Mes roses se sont épanouies ainsi que mes orchidées »

Dort l’orchidée, dort l’or des idées,
Et roses, nous vivrons ce que vivent les roses
L’espace d’un matin. Orphelins de Pivot,
Nous sommes vivants dans le flot de tes dictées,
Je prends le flambeau de la flamme,
Vêtu de ta blouse grise, je dicte et nous grise de mots.

Resplendir

De ses fleurs peu à peu écloses,

Il resplendit.

Resplendir suffit à son maintien,

Patience, constance souterraine aux yeux clos,

Labouré, nourri de soins,

Joie soudaine d’Avril au réveil de ses fleurs tardives,

Mon pommier enfin chante le rose tendre.

Une eau si pure

Ce voile de mariée qui descend de la roche

en escaliers,

froufrou d’eau sur sa robe verte.

Une eau si pure

que son miroir nous renvoie le ciel.

Les peintres l’ont peinte en crayons de glace bleue

et nous irons cueillir ses fleurs

que le printemps fera bouillonnantes.

Cette eau si pure que tu rêvais de mettre en bouteille

ne coule plus qu’en filets d’eau :

puis goutte à goutte,

une dernière goutte,

jusqu’à la pluie.

– Dame nature nous rend ce que nous lui donnons

à boire et à manger -,

Elle porte dans son ventre tant de boites toxiques

et indigestes

que le prochain séisme vomira,

que le prochain incendie explosera,

que les prochaines pluies diluviennes disperseront !

Alors, l’eau, l’air et la terre

ne seront que poison !

Cette eau si pure que je me retiens de boire.

Raconte un peu

Raconte-moi tes voyages

Les parfums des tropiques mêlés à ceux de leurs sueurs,

La vue plongée au Niagara jusqu’au fond de ses chutes,

Raconte d’Indonésie les volcans jusqu’à la braise d’Islande,

 L’océan, jusqu’aux quarantièmes rugissants,

Moi, arbre de haute futée, posé à l’orée de mon bois,

M’élevant jusqu’aux ciels constellés, me suis construit de verdure

Avec mes amis les oiseaux ambassadeurs de soleil :

Le pinson, l’engoulevent et la mésange,

Je capte l’air humide et la rudesse des ronces,

Froissé du moindre effleurement.

Raconte un peu pour me faire rêver encore.